Vigile Pascale 2022 - Luc 24, 1-12
Trois moments dans ce récit d’une grande humilité, comme la fragilité d’un commencement.
1°) Ce premier jour de la semaine est le Grand Sabbat de la pâque. Il célèbre symboliquement l’achèvement de la création en Dieu. Une libération, mais laquelle ? Quel est donc cet achèvement d’une création en travail d’enfantement ? Nous sommes à la pointe de l’aurore, ce moment indécis où l’on pressent que la nuit va le céder à la clarté, mais rien ne semble encore joué.
Les femmes (je le souligne = la première annonce viendra d’elles) cheminent vers le tombeau (la mort) et elles n’y trouvent que le vide. Le chemin s’arrête là. Situation de deuil : absence du défunt. Pas de corps à embaumer, à pleurer, à pouvoir prendre encore dans ses bras. Quoi de plus humain que ce premier moment où la séparation nous trouve vides et désemparés. Tournés vers la terre qui a avalé la vie, vides de la présence, tournés vers le passé où semblent s’être figée la vie qui ne reviendra pas.
2°)
Et il arriva : car que peut-il arriver de nouveau, la face comme penché à terre,
dans un tombeau où la vie ne peut plus être, si ce n’est le manque qui se
creuse, la douleur de la séparation, voire l’absurde de toute cette histoire,
tant d’espoirs soulevés et d’amour donné pour en arriver là ! La grande
interrogation de l’humanité. Le corps absent : qu’est-ce qui fait sens sinon la
Parole remémorée ? Elle qui fait passage, pâques. Comment la première annonce
retentit dans le cœur des femmes ? Voilà qui reste un mystère. Surgissement qui
appelle déjà la renaissance, la vie qui sera suscitée à nouveau, re-suscitée,
et que manifestent ces deux messagers éclatants de lumière. Mais cela demeure
encore extérieur à elles. La résonance de la Parole ne prend pas encore chair
en elles. Cela ne fait pas corps avec elles. C’est comme extérieur à elles.
Mais elles sont troublées et doivent le répéter, le redire. Car elles
pressentent qu’il y a là quelque chose de bouleversant, de nouveau, d’inouï,
qui n’a pas encore été entendu.
C’est
ici le premier moment, celui de l’annonce face à l’absence déroutante,
douloureuse. Une annonce = La Parole qui réveille quelque chose d’enfoui. Mais
on a du mal à y croire. Le chemin se fait pour l’instant répétition de l’annonce
(c’est le troisième moment) mais toujours dans l’absence insensée, pesante. Et
Pierre aussi va faire à son tour l’expérience de l’absence, du vide et d’une
annonce qui est encore sans échos en lui. Dans le tombeau il n’y a plus rien à chercher,
et surtout pas de vie. C’est dans la Parole que tout pourra renaître. Saint
Jean le dira, il est la Parole de la vie.
3°) Sans doute faut-il entendre avec respect ce premier moment. Quelque chose s’éveille, qui relève du mystère et non de l’évidence ou de la preuve. Quelque chose qui déborde l’histoire et la transfigure, l’histoire de chaque vie et de la création tout entière peut-être. Quelque chose qui ne peut être entendu qu’au bord d’un rivage où l’on ne sait quelle pourrait bien être l’autre rive et le voyage pour y parvenir. Quelque chose qui ne fera plus revenir au tombeau et à l’expérience du vide, et qui s’ouvre à une Parole revenue à la mémoire renaissante.
Viendra
l’expérience de la présence dans la distance, de la vie revenue, re-suscitée.
Mais attendons. Ce sera Emmaüs. Alors la joie éclatera : Alléluia Christ est
vivant, il est ressuscité !
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